Reportage

4L Trophy : elles l’ont rêvé, elles l’ont fait

Yelen BONHOMME-ALLARD
4L Trophy : elles l’ont rêvé, elles l’ont fait

En participant à leur premier 4L Trophy, Suzanne, Camille, Sarah et Johanna ont récolté des dons pour l’association « Les Enfants du désert ».

© flashsport

Camille, Suzanne, Sarah et Johanna ont participé à la 26e édition du 4L Trophy. Une expérience riche en émotions, qui a nécessité plusieurs mois de préparation. Durant quinze jours, elles ont parcouru 7 400 kilomètres à travers trois pays, survécu à 48 heures en autonomie dans le désert marocain, encaissé le manque de sommeil, et affronté les pannes mécaniques successives. Mais le jeu en valait la chandelle. Récit.

« C’est une aventure qui ne se raconte pas, elle se vit » laisse en suspens Sarah, des souvenirs encore plein la tête au terme de deux semaines sur les routes. Avec sa meilleure amie Johanna, elle vient d’achever son premier 4L Trophy. Un rallye automobile solidaire dans le désert marocain, destiné aux moins de 28 ans. Comme Sarah et Johanna, ils étaient 1 227 tandems à prendre le départ et espérer arriver à Marrakech sans embûches, à bord de Renault 4L, relookées pour l’occasion. Mais avant le grand voyage, sa préparation a nécessité une bonne dose d’énergie, quelques courtes nuits, des centaines d’emails et beaucoup de persévérance. Si le 4L Trophy a eu lieu du 16 au 26 février 2023, les deux amies ont débuté les démarches dès mai 2022, trouvant rapidement, telle une évidence, le nom de leur association : « Le Binôme Infernal ». Professeur des écoles et infirmière dans la vie, mais aussi coéquipières dans les gymnases depuis 15 ans, Johanna et Sarah connaissent les rudiments de la mécanique. Elles optent donc pour une 4L fourgonnette sans trop de réparations. « Mais on ne voulait pas qu’elle soit en parfait état non plus, nuance Johanna. Nos critères étaient clairs : un châssis sain, une voiture roulante et une fourgonnette pour pouvoir dormir dedans. Il était hors de question qu’on dorme dans une tente ! » Pour l’aménagement intérieur et l’entretien mécanique, elles peuvent s’en remettre à leur père respectif qui se sont tous deux investis sans compter jusqu’au départ. Après avoir épluché pendant plusieurs semaines les sites de petites annonces, elles trouvent finalement leur bolide (surnommé ultérieurement Pink Lady) à Metz, pour la modique somme de 4 800 euros.

Une course contre la montre

Pour Camille et Suzanne, le démarrage a été plus tardif. Les deux anciennes collègues, devenues amies, ont réellement commencé à préparer leur voyage dès septembre 2022. Adeptes de la dernière minute et de la couleur verte, elles choisissent un patronyme qui leur colle à la peau : « Les Citrons Pressés ». Issues du monde de l’événementiel, les deux amies savent organiser des événements rapidement et sous la pression. Pour récolter de l’argent, elles multiplient les initiatives : ventes de cupcakes avec les clubs du Paris FC et HBCT, ventes de crêpes à la PPA Business School, confection de papiers cadeaux, tournois de futsal, ou encore tombola. Rien ne les arrête, d’autant qu’elles ambitionnent de reverser une partie de ces fonds à l’association « Les Enfants du désert » avec laquelle le 4L Trophy est associé. En ce qui concerne la voiture et le couchage, le duo adopte une tout autre stratégie. « Comme nous nous sommes concentrées sur nos événements, nous avons lancé les recherches de la voiture à partir de fin octobre, explique Camille. Nous avions donc très peu de temps. Nous cherchions une voiture prête à partir que nous avons trouvée auprès d’un couple super gentil qui devait aussi participer à la course. Mais avec le Covid et une grossesse en cours, ils y ont renoncé ». Après un aller-retour Essonne-Lyon, les poches plus légères de 6 300 euros, Camille et Suzanne découvrent les premières sensations de rouler sans direction assistée. Pour elles, une chose est sûre : elles dormiront dans une tente, moins étroite que la voiture.

La quête des sponsors

Au fil des mois, les deux équipages connaissent les mêmes incertitudes lors de la recherche de sponsors. Car si le côté humanitaire est souvent salué par les entreprises, certaines sont réfractaires à l’utilisation des Renault 4L, jugées trop polluantes et à l’encontre de leur responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Les Citrons Pressés ont justement voulu contourner cette opinion en réalisant à leur retour une étude du bilan carbone émis pendant le rallye. Au terme de centaines d’emails, de déplacements et d’annonces, les deux équipages parviennent à convaincre une quinzaine de sponsors, ainsi que des entreprises qui s’investissent via des dons. Originaire de la Sologne, le Binôme Infernal parvient à mobiliser et rassembler toute une communauté. En parallèle de son agenda professionnel, le binôme organise un concours de pétanque, une brocante et gère un stand au marché de Noël. Le succès est à chaque fois au rendez-vous. L'un de ses sponsors lui prête également un terrain du club de football de Billy (41) afin d'y établir un village départ. Une trentaine d’équipages originaires de l’Île-de-France, de la Normandie et des Hauts-de-France s’y rejoignent avant le grand départ le 16 février vers Biarritz, situé à 600 kilomètres. L’occasion de nouer de premiers liens, comme ce fut le cas avec « Les Bons Vivants » (Valentin et Kévin). Tous les six seront inséparables jusqu’à leur retour en France.

Après une vérification des véhicules, presque sans fausse note, les six téméraires reprennent la route vers Algésiras au sud de l’Espagne (1 443 km). Tous se souviennent avec amusement de leur bivouac improvisé dans le centre-ville de Cáceres (interrompu par la police espagnole), de Johanna, cramponnée à sa portière alors qu’elle conduit pour éviter que les bourrasques ne l’emportent (les visseries du capot n’ont d’ailleurs pas résisté) ou encore de la dernière douche négociée avec le gardien d’une piscine municipale. Au terme de longues heures d’attente sur le port, puis d’une traversée retardée du Détroit de Gibraltar, le Maroc et la compétition deviennent réalité le 19 février.

Entrer dans le vif du sujet

Entre la première étape au départ de Boulajoul et l’arrivée à Marrakech prévue le 24 février, 400 kilomètres séparent les deux villes. Les équipages doivent réaliser ce parcours en 6 jours, et regagner chaque soir avant la tombée de la nuit le campement prévu par les organisateurs. Ici, pas de chrono. Chacun est libre de suivre son parcours, mais le classement est établi quotidiennement en fonction de la distance parcourue. La plus petite étant le mieux. « Si c’était une question de temps, personne ne se serait arrêté pour nous aider », ironise Camille qui est restée bloquée sur le bord de la route à de nombreuses reprises suite à des problèmes mécaniques. Pour les guider, les participants sont équipés d’un roadbook et d’une boussole. Rapidement la répartition des rôles s’opère : Johanna et Camille prennent le volant, tandis que Sarah et Suzanne œuvrent comme copilotes. « Qui m’aurait dit qu’il y avait des cailloux dans le désert ? », s’étonne encore Johanna. Secouées dans leur vieille taule, les deux équipes enchaînent les kilomètres, les playlists élaborées avant le départ, et les divers paysages (terre, dunes, montagnes enneigées), tout en suppliant leur monture de tenir bon.

Aider son prochain

Heureusement, ces naufragées de la route peuvent compter sur le soutien de nombreux trophystes qui n’hésitent pas à interrompre leur course afin de leur prêter main forte. Car outre la compétition, la solidarité et le partage sont les deux valeurs promues dans ce rallye automobile. Tous les participants avaient pour mission d’acheminer 10 kg de nourriture à la Croix Rouge, ainsi que des dons à l’association « Les Enfants du désert ». Le Binôme Infernal a ainsi pu offrir 35 kg de matériel médical et sportif, ainsi qu’un chèque de 600 euros qui participera à la construction d’écoles à travers le pays. Cette générosité anime aussi les Citrons Pressés qui, en plus des fournitures offertes par leurs divers partenaires, ont pu soutenir l’association à hauteur de 250 euros. Grâce à la vente de sa Renault 4L et de la tombola, le duo compte lui verser une seconde donation d’un minimum de 1 500 euros.

Pendant une journée, Camille et Suzanne ont quitté les pistes pour passer du temps auprès des écoliers et réaliser des activités. Comme elles, 19 autres équipages ont été sélectionnés comme ambassadeurs après avoir répondu à un appel à projets. À l’aide de bouteilles en plastique et de chutes de tissu, les deux amies mettent en place un atelier de confection de bracelets. Une journée très attendue par Camille : « Nous avons essentiellement participé à la course pour le volet humanitaire. Pour moi c’était non négociable, même si cela nous a coûté notre place dans le classement car nous avons manqué une journée de course ». L’étudiante de 24 ans est déjà engagée auprès d’associations en Afrique et a réalisé plusieurs voyages humanitaires au Togo.

Réaliser ses rêves pour en avoir de nouveaux

Mordues par la compétition, Sarah et Johanna défient le chronomètre et leurs concurrents. Elles sont arrivées 525e sur 1 227 équipages (318e pour le marathon en autonomie pendant 48 heures) et 104e sur 322 équipages exclusivement féminins. À leur arrivée à Marrakech, elles laissent retomber la pression et les larmes de satisfaction. Après une soirée de liesse et une journée de repos à l’hôtel, couplée à la découverte du souk, le trajet retour attend déjà les quatre aventurières et leur 4L, plus aguerries et épuisées que jamais. Les moments de stress, les doutes, la fatigue et les pannes n’ont pas entaché l’amitié qui unit ces deux duos. Car le séjour a aussi été marqué par de nombreux fous rires, compilés sur des vidéos, puis publiés sur les réseaux sociaux.

Séduite pas le concept, Johanna envisage de participer à d’autres compétitions de ce genre – avec ou sans voiture –, tandis que sa partenaire Sarah se laisse le temps de la réflexion. Pour Camille, ce n'est que le début : « C’est avec plaisir que je repartirai sur un rallye quel qu’il soit, mais peut-être plus en 4x4 ! L’association des Citrons Pressés n’a pas fini d’exister ! Et pour ce qui est de voyage humanitaire le prochain est déjà en cours d’organisation… ». Une soif d'aventure que partage Suzanne : « Je repartirai sans hésiter sur un autre rallye mais pas sans mon binôme. Même si je dois avouer que sa conduite était parfois trop sportive ! »

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