Quand l'hydrogène pollue le débat sur la fin du thermique en Europe en 2035

Quand l'hydrogène pollue le débat sur la fin du thermique en Europe en 2035

Le débat sur la fin du moteur thermique en 2035 fait rage au niveau européen.

L'échec du vote du Conseil européen, qui devait sceller la fin de la commercialisation des moteurs thermiques en Europe en 2035, n'est pas lié à l'automobile directement. L'enjeu est beaucoup plus stratégique, ce qui explique d'ailleurs le silence de la France sur ce sujet. L'automobile est, en fait, une victime collatérale de l'incroyable bras de fer auquel se livrent la France et l'Allemagne autour de l'hydrogène bas carbone et le nucléaire, d'un côté, et de l'hydrogène vert de l'autre.

Une fois n'est pas coutume, l'automobile n'est pas toujours au centre de tous les enjeux au niveau européen. L'échec temporaire du vote de la fin du moteur thermique en 2035 en Europe dissimule en fait un affrontement d'une plus grande ampleur entre la France et l'Allemagne. En cause : l'hydrogène bas carbone et le nucléaire, d'un côté, et l'hydrogène vert de l'autre. Une fois cette crise sur l’hydrogène résolue, le vote instituant la fin de la commercialisation des voitures thermiques en 2035 devrait être validé in fine.

L'affrontement entre l'Allemagne et la France autour de l'hydrogène

L'objet de cet affrontement se concentre autour de la directive sur les énergies renouvelables. Défendu à Stockholm par la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, l'hydrogène bas carbone reste minoritaire. Rappelant que pour parvenir à l'objectif de neutralité climatique en 2050, il est nécessaire de compter sur le nucléaire. L'Allemagne défendant le seul hydrogène vert produit à partir de l'éolien et du photovoltaïque.

L'automobile a simplement été polluée par ce conflit autour de l'hydrogène. Alors que le Parlement européen a déjà approuvé l'interdiction de la vente de voitures neuves à essence et diesel dans l'Union européenne à partir de 2035, il appartenait au Conseil européen de donner son approbation définitive, le 7 mars, avant sa publication au Journal officiel. Mais rien ne s'est passé ainsi...

À cette occasion, l'Allemagne a prôné, avec l'Espagne et l'Italie, l'introduction d'un carburant de synthèse dans l'automobile à partir de 2035. À la demande de Rome et Berlin, les 27 avaient en effet intégré au texte un possible feu vert à l'avenir pour des technologies alternatives comme les carburants synthétiques (e-carburants) si celles-ci permettent d'atteindre l'objectif de supprimer totalement les émissions de gaz à effet de serre des véhicules. La France n'est pas entrée dans ce débat, et on comprend pourquoi, laissant l'Allemagne assumer une minorité de blocage.

Pour faire du carburant de synthèse, il faut de l'hydrogène vert

Rappelons que ce carburant de synthèse répond à un procédé chimique obtenu sans pétrole. Il est produit en combinant du dioxyde de carbone capturé dans l'atmosphère et de l'hydrogène vert. Ce même hydrogène que défend l'Allemagne contre la France. À noter que le constructeur Porsche a été le premier à miser sur cette technologie. Une première usine est en construction depuis l'an passé au Chili en partenariat avec Siemens Energy ou encore ExxonMobil et l'italien Enel.

L'Allemagne défend beaucoup plus que l'industrie automobile

Ce vote doit être obtenu à la majorité qualifiée, comme c’est le plus souvent le cas au Conseil européen, et réunir deux conditions : 55 % des États membres doivent voter pour (en schématisant, environ 15 pays sur 27) et les États membres votant pour doivent représenter 65 % de la population totale de l’Union européenne.

La Suède, qui occupe la présidence de l’Union européenne depuis le 1er janvier 2023, vient d’indiquer que le Coreper s’était donné un peu de temps supplémentaire pour préparer la réunion du Conseil. Depuis le 3 mars 2023, ce vote a été reporté sine die.

Le premier cut est donc clairement aux mains de l’Allemagne. Laquelle ne défend pas seulement l'industrie automobile dans cette affaire mais bien l'hydrogène vert qui pourrait relancer l'ensemble de sa stratégie mise à mal par la guerre en Ukraine et les problèmes d'approvisionnement en gaz.

Fin des moteurs thermiques : un vote qui dépend de l'hydrogène

Le porte-parole de la Suède, qui assure la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, a en définitive précisé le report du vote final « à une date ultérieure », l'abstention annoncée de l'Allemagne compromettant la majorité qualifiée nécessaire. 

Rappelons que ce texte prévoyant de réduire à zéro les émissions de CO2 des voitures et camionnettes neuves en Europe à partir de 2035 a fait l'objet en octobre 2022 d'un accord entre États membres et négociateurs du Parlement européen, formellement approuvé mi-février à une courte majorité par les eurodéputés en séance plénière.

Le carburant de synthèse de nouveau en débat après ce premier blocage

Dans l’hypothèse d’un potentiel blocage en Conseil, la procédure prévoit que le Parlement et le Conseil renégocient ensemble sur la base du dernier accord établi en octobre 2022. Le débat s’articulerait autour des points de blocage qui ont conduit à l’opposition de ces États membres. Soit le carburant de synthèse, ce qui revient à arbitrer entre l'hydrogène vert et l'hydrogène bas carbone. Plusieurs pays soutiennent la prise en compte de ces deux technologies... L'Allemagne et l'Espagne refusent cette option.

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