Vincent Salimon, président de BMW Group France, poursuit la stratégie multi-énergies des marques BMW et Mini en France.
© Florian Léger
À l'instar d'autres constructeurs comme Toyota, BMW ne se range pas derrière le 100 % électrique. Même si le constructeur bavarois compte commercialiser plus de 50 % de véhicules full électriques à l'horizon 2030, BMW Group entend poursuivre sa stratégie multi-énergies en Europe.
À l'occasion d'une interview de Vincent Salimon, président de BMW Group France (Auto Infos n°1427 février 2023), le constructeur confirme sa stratégie multi-énergies et prône une absence de précipitation pour basculer vers le tout électrique en 2035. Outre le développement de l'hydrogène, le constructeur allemand défend les motorisations alternatives hybrides pour effectuer ce passage vers le zéro carbone. Une voix qui rejoint celle de Toyota au niveau mondial alors que d'autres constructeurs comme Stellantis, Volvo encore Volkswagen Group ont d'ores et déjà annoncé une bascule au 100 % électrique (BEV) pour 2030.
Auto Infos : Est-ce stratégique de prendre son temps pour annoncer le 100 % électrique chez BMW ?
Vincent Salimon : Nous sommes prêts pour 2035 mais cela correspond effectivement à notre stratégie de dire qu’il ne fallait pas aller trop vite sur le 100 % électrique et qu’il fallait une clause de revoyure car le développement des infrastructures n’est pas encore suffisant. Le 100 % électrique se justifie en urbain mais il faut aussi envisager des alternatives.
Auto Infos : La trajectoire de la fin du thermique en 2035 en Europe vous semble-t-elle réaliste ?
Vincent Salimon : Notre position n’a jamais changé. Nous ne sommes pas convaincus que tout le monde sera prêt en 2035. Cela rebute certains particuliers qui préfèrent attendre avant d’acheter un véhicule. Il faut aller vers un développement de l’électrique tout en se demandant si l’électrique à batterie correspond à la totalité des usages. Il faut travailler sur des alternatives. En 2023, nous allons présenter un iX5 en version hydrogène.
Auto Infos : Quid de la clause de revoyure en 2026 en Europe ?
Vincent Salimon : L’annonce de la fin du thermique en 2035 provoque de l’attentisme chez le client particulier. La clause de revoyure en 2026 est une bonne décision. Toute la gamme Mini sera 100 % électrique en 2030. Par ailleurs, 50 % de la gamme BMW sera commercialisée en 100 % électrique à cette même date. Nous attentons que la clause de revoyure de Bruxelles soit réaliste sur la situation, tant au niveau des infrastructures que des technologies de batterie en Europe.
« Clause de revoyure : nous attendons que Bruxelles soit réaliste ».
Auto Infos : Y a-t-il des solutions alternatives à la batterie électrique ? Quid de l’hydrogène, du carburant synthétique ?
Vincent Salimon : Il y a l’hydrogène fabriqué avec de l’énergie verte. Il faut aussi des infrastructures de recharge. Nous ne croyons pas encore au carburant synthétique. C’est trop cher pour le moment. Cela peut correspondre aux besoins d’une minorité de clients. L’hydrogène est déjà cinq fois moins cher aujourd’hui qu’un carburant synthétique. Il faut que l’on travaille tous dans ce sens.
Auto Infos : Travaillez-vous donc sur la nouvelle norme thermique Euro 7 ?
Vincent Salimon : Nous investissons sur Euro 7. Il est important de pouvoir proposer des alternatives. Nous verrons en fonction des besoins et de l’évolution des infrastructures de recharge. Nous ne travaillons pas seulement sur la baisse des émissions de CO2 à l’usage mais sur la totalité de l’écosystème y compris au niveau de la production.
Auto Infos : Cette nouvelle norme Euro 7 est-elle satisfaisante selon vous ?
Vincent Salimon : Pour nous, l’Euro 7 est un passage essentiel. En revanche, la proposition de la Commission européenne n’est ni efficace en matière de protection de l’environnement (nous proposions des objectifs plus ambitieux), ni réaliste en matière de délai ou de coût. Elle nécessite des discussions très importantes au niveau du cahier des charges pour rendre le protocole de mesure plus scientifique. Le protocole proposé nécessite par ailleurs de prendre en compte des situations qui n’arrivent presque jamais dans la réalité, mais nécessiterait des coûts additionnels très importants pour les clients.
Auto Infos : L’infrastructure de recharge progresse-t-elle comme vous le souhaitez en France ?
Vincent Salimon : Avec 82 000 bornes aujourd’hui contre 100 000 promises en 2021, l’infrastructure n’est pas encore satisfaisante. Mais est-ce une bonne raison pour tout arrêter ? Non au contraire ! Il faut continuer à investir. Nous le faisons à travers Ionity, qui est un réseau efficace sur les autoroutes. Nous le complétons avec notre réseau de concessionnaires où nous avons 450 bornes de recharge rapide, dont la moitié est disponible sur les réseaux publics. Il faut que chacun puisse travailler sur le renforcement de l’infrastructure de recharge sans se renvoyer la responsabilité.
Auto Infos : Comment vous préparez-vous à la mise en place des ZFE dans les 43 communes françaises de plus de 150 000 habitants ?
Vincent Salimon : Nous voyons bien que malgré la réglementation les choses évoluent encore. L’une des solutions serait d’y aller progressivement et de communiquer localement. Il faut se fixer des objectifs réalistes avec, par exemple, un moteur diesel moderne qui pourrait être en Crit’Air 1 en réalité. Faisons en sorte de tenir compte des progrès des moteurs depuis vingt ans.
Auto Infos : Le rétrofit est-il également une bonne solution pour franchir cette transition vers l’électrique ?
Vincent Salimon : C’est l'une des solutions mais le rétrofit ne sera pas une solution majoritaire. Nous offrons aussi la possibilité de faire ce rétrofit en usine. Mais cela ne va pas changer la donne.