© Kawee Wateesatogkij (Goodyear)
Après le « vote historique » des eurodéputés ce mercredi 8 juin, nous avons recueilli les réactions des principaux intéressés, à savoir les constructeurs automobiles.
Le Parlement européen a adopté hier, mercredi 8 juin, la proposition du nouveau paquet climat « Fit for 55 » visant, pour l’automobile, à interdire la vente des véhicules (particuliers et utilitaires) thermiques dès 2035 en Europe. Une mesure qui s’inscrit comme un véritable tournant pour le secteur alors que la loi française avait fixé cette échéance à 2040 par le biais de la loi Climat & résilience. Les constructeurs vont donc devoir, en treize ans, faire leur « révolution ». Et même si, sans surprise, ils se disent majoritairement « prêts » à affronter cette nouvelle réalité, à coup d’investissements majeurs dans la recherche et développement ainsi que sur les lignes de production, la marche semble encore haute.
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Un virage « inévitable »
Pour l’ensemble des marques ou groupes automobiles que nous avons pu joindre, le résultat de ce vote n’a rien de surprenant. « Le Parlement européen a envoyé aujourd'hui un signal clair et attendu pour la protection du climat : le virage vers l'électromobilité est irréversible. C'est le seul moyen écologique, technologique et économique sensé pour remplacer le plus rapidement possible les moteurs à combustion », commente Volkswagen Group. « La date est connue depuis un an maintenant, et ce vote n’a donc rien de surprenant », nous a-t-on confié chez Kia France. Mais si ce tournant semble donc inévitable et dans la logique des choses, cela ne fera pas que des heureux. Cela reste une décision politique avec des conséquences sur des millions de personnes travaillant dans une industrie en plein chamboulement et/ou qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler, et n'ont pour le moment pas les moyens d'acheter un véhicule électrique.
Une ambition réaliste ?
Alors du côté des instances représentatives, on tire la sonnette d’alarme : « L’interdiction du thermique, c'est un grand saut dans le vide, et un sabordage industriel », a dénoncé ce jeudi Luc Chatel, président de la Plateforme automobile (PFA), à l’antenne de BFM Business. « En s’enfermant dans une solution unique, l’Europe fait le choix de produire moins et de polluer plus », commente de son côté Xavier Horent, délégué général de Mobilians.
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Étrangement (ou pas…), chez les constructeurs, les commentaires sont beaucoup moins virulents et l’optimisme semble même de mise. Il faut dire que les marques se préparent à relever ce challenge de taille depuis quelques années maintenant. Les derniers mois ont d’ailleurs vu chaque groupe annoncer son plan d’actions pour les années à venir, une sorte de course contre la montre avec pour chacun un horizon proche de celui défini par le paquet climat « Fit for 55 ». « Nous continuerons à suivre le plan présenté par le groupe le 1er mars dernier », assure-t-on chez Stellantis. Même son de cloche pour Kia France qui, avec un véhicule 100 % électrique n°1 de ses ventes en 2021, aborde le sujet en toute confiance. Cela va même « dans le bon sens pour l'image du secteur automobile alors qu'une décision contraire aurait pu être préjudiciable, nous confie Lionel French Keogh, président de Hyundai Motor France. On peut toujours argumenter sur le fait qu’une voiture électrique n’est pas zéro émission mais une chose est sûre, qu'elle soit à batteries ou à pile à combustible, elle est bien meilleure que le thermique. La bonne nouvelle, c’est qu’on a dix ans pour se préparer. Si on se plaint souvent parce que le temps politique n’est pas en adéquation avec le temps industriel, en la matière la perspective est donnée nous laissant le temps d’envisager des changements. »
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Des conditions nécessaires pour réussir
Du côté d’autres constructeurs, on souligne quand même la nécessité de réunir toutes les bonnes conditions à la réussite de « ce pari pour l’avenir ». « Nous nous félicitons de cette décision », nous répond Mercedes-Benz Group, qui se dit « prêt à passer au tout électrique partout où les conditions du marché le permettent ». Selon ses porte-paroles, « la résolution oblige les politiciens à fournir l'infrastructure nécessaire. Ce qui est décisif pour réussir la protection du climat dans tous les modes de transport, c’est l’acceptation des nouvelles technologies, et non l'interdiction des technologies traditionnelles ». Un avis partagé par le groupe Volkswagen qui rappelle qu’ « il est désormais important que les objectifs politiques soient également soutenus par des mesures politiques correspondantes dans tous les États membres. Il s'agit notamment d'un approvisionnement suffisant en cellules de batterie, d'une expansion beaucoup plus rapide de l'infrastructure de recharge et d'une transition énergétique accélérée. » Pour Lionel French Keogh, de Hyundai Motor France, les instances européennes devront veiller au développement uniforme du marché électrique sur le Vieux Continent. Car « si en France, en Allemagne, aux Pays-Bas ou encore en Norvège, la croissance est en bonne voie dans d'autres pays le marché du véhicule électrique n'existe quasiment pas. L'approche doit être nationale mais, aussi et surtout, européenne, vue d'une manière globale », conclut-il.