« Le passage piéton Flowell augmente de 67 à 94 % le respect de la priorité piéton », avance Frédéric Touvard.
© Colas
En tests dans plusieurs communes de France mais aussi d’Europe depuis plusieurs années, la signalisation lumineuse dynamique au sol devrait progressivement se démocratiser depuis qu’un nouvel arrêté relatif à la modification de la signalisation routière a été publié au Journal officiel du 14 avril 2023.
Sur les pavés... pas de plage mais une dalle lumineuse qui transforme la chaussée en un chemin semé de bonnes intentions sécuritaires. Si cette signalisation lumineuse dynamique au sol peut effectivement faire penser à un tapis de danse interactif, l’affaire est on ne peut plus sérieuse. Selon le bilan annuel de l’ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière), en 2021, 8 588 accidents corporels impliquaient un piéton, soit 16 % de l’ensemble des accidents. 414 d’entre eux se sont d’ailleurs soldés par le décès dudit piéton, soit 14 % de la mortalité routière.
Cette année-là toujours, la moitié des piétons de 18 à 54 ans ont été fauchés hors agglomération, mais de nuit, et 4 piétons tués sur 10 avaient 75 ans ou plus. Des chiffres qui rappellent que protéger ces usagers vulnérables, notamment quand le jour se lève ou qu’il décline, constitue un enjeu particulièrement crucial.
Une idée lumineuse
Dans cette optique, le groupe Colas, qui s’est donné pour défi d’inventer des infrastructures de mobilité durable afin de désenclaver les zones rurales, a imaginé la solution Flowell. Lauréate du Janus de l’Industrie 2022, celle-ci intègre des dalles, composées de LED encapsulées dans un substrat multicouche et raccordées à un réseau électrique, qui sont ensuite collées sur la chaussée, en lieu et place d’un marquage au sol existant.
Connecté à des bornes de pilotage, elles-mêmes reliées directement au système de gestion des feux tricolores ou à des capteurs de type caméra thermique/podotactile, ce revêtement « a été conçu pour résister au trafic routier et aux conditions climatiques », précise Frédéric Touvard, directeur business développement de Flowell.
« Modulable en forme et en couleurs, il sert ainsi à renforcer la visibilité et la sécurité autour des passages piétons en alertant les véhicules qu’il faut respecter la priorité. Il aide aussi à guider les flux pour la traversée d’un boulevard complexe, comme c’est le cas sur notre site expérimental de La Défense, ou pour faire apparaître des zones de stationnement spéciales ou spécifiques, une place de livraison pouvant devenir une place handicapée ou réservée à la recharge. Bref, on peut reconfigurer l’espace avec plus de flexibilité », souligne Frédéric Touvard.
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S’expérimentant en conditions réelles depuis déjà quatre années à Paris, Lyon, Mandelieu-la Napoule et même Portsmouth, le projet Flowell porte déjà ses fruits en matière de sécurité puisque, selon les estimations, « le passage piéton Flowell augmente de 67 à 94 % le respect de la priorité piéton », avance Frédéric Touvard.
Plein les yeux ?
Pourtant, selon un rapport de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire présenté à l’Assemblée nationale le 29 mars 2023, la publicité lumineuse, en plus d’engendrer une pollution visuelle, affecte la sécurité routière.
D’après l’institut de recherche pour la sécurité routière hollandais, « il est même démontré que les conducteurs sont plus lents à réagir et ont besoin de distances de freinage plus longues. De même, ils zigzaguent davantage et quittent plus souvent la route des yeux en présence de panneaux publicitaires. » Si ces affichages dynamiques peuvent perturber la conduite des automobilistes, pourquoi n’en serait-il donc pas de même de la signalisation lumineuse ?
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À cette interrogation, Frédéric Touvard répond qu’« avec l’Ergocentre [spécialiste en ergonomie et expérience utilisateurs, ndlr], nous menons une étude sur la pollution lumineuse avec un "eye tracker" pour voir ce que chacun regarde. Nous avons ainsi pu constater que l’affichage au sol, contrairement à celui vertical, ne délivre pas le même message mais suscite la vigilance. » Néanmoins, « pour passer à la commercialisation, il faut garantir la résolution des contraintes permettant d’envisager un déploiement massif sur la voie publique. Mais cette homologation devrait arriver dans peu de temps, j’ai bon espoir avant la fin de l’année », admet Frédéric Touvard.
Retrouvez l’intégralité de cette enquête dans le magazine n°286 de L'Automobile & l'Entreprise