Entretien

Questions à Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif

Questions à Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif

Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif.

Avec 6,25 millions de contrats auto, la Macif est le premier assureur automobile en France. Pour contrer les dérives qu’il constate sur le marché du remplacement du vitrage, en forte hausse en coût comme en fréquence, la mutuelle se positionne comme un régulateur avec le rachat, le 13 février dernier, de Mondial Pare-Brise. Son directeur général revient sur cette acquisition inédite.

Décision Atelier : Avec le rachat de Mondial Pare-Brise, la Macif inaugure en France la prise de contrôle par un assureur d’une enseigne de réparation…

Jean-Philippe Dogneton : Il fallait bien qu’un assureur saute le pas. Nous tirons ce fil de la réparation. Autour du pare-brise, depuis une dizaine d’années, on nous répercute des hausses annuelles exorbitantes de coût, bien au-delà de l’inflation. Parallèlement, le nombre d’opérations augmente : 2,5 millions en 2021, dont 300 000 rien que pour la Macif. La réparation vitrage nous a coûté plus de 200 millions d’euros l’an dernier, peut-être 215 millions cette année. Nous avons sans doute fait une erreur en faisant en sorte que se créent sur ce marché des situations de quasi-monopole autour de spécialistes. Il y a des pratiques qui font qu’une même réparation est facturée du simple au double. Les assureurs ne peuvent pas être la variable d’ajustement du marché de la réparation automobile. Face à ces hausses qui ont forcément été imputées aux assurés, puisque la modération est devenue impossible, la solution s’est imposée et nous a conduits à la décision du rachat de Mondial Pare-Brise, une enseigne sérieuse, conforme à notre logique avec un bon maillage et une vraie expertise technologique sur un secteur qui évolue très vite.

« Les assureurs ne peuvent pas être la variable d’ajustement du marché de la réparation automobile. »

Décision Atelier : La Macif travaillait déjà avec Mondial Pare-Brise. En quoi ce rachat va-t-il changer les choses ?

Jean-Philippe Dogneton : Déjà, nous souhaitons développer, en France comme à l’étranger, l’enseigne qui représente aujourd’hui 10 % de parts de marché. Nous pourrions aussi diversifier ses activités. Si un assureur ne s’était pas proposé pour racheter Mondial Pare-Brise, un fonds d’investissement l’aurait fait avec toujours cette même mécanique de profit. Ce rachat est une rare opportunité pour qu’un assureur agisse. Je ne suis pas là pour contrarier le modèle de Mondial Pare-Brise qui reste ouvert, mais je souhaite contribuer à la régulation de ce marché avec une maîtrise de son inflation.

« Nous avons sans doute fait une erreur en faisant en sorte que se créent sur ce marché des situations de quasi-monopole. »

Décision Atelier : Comment les franchisés prennent-ils l’arrivée comme principal actionnaire un donneur d’ordres ?

Jean-Philippe Dogneton : Je ne les ai pas encore rencontrés directement. L’annonce a été faite par la direction générale de Mondial Pare-Brise. Je crois que ça été bien reçu. Nous allons apprendre à avancer ensemble. Nous sommes au début d’une histoire.

« Je souhaite contribuer à la régulation de ce marché avec une maîtrise de son inflation. »

Décision Atelier : Les franchisés travailleront avec la même profitabilité ?

Jean-Philippe Dogneton : La Macif n’interviendra pas directement sur le sujet de la rémunération de la main-d’œuvre. C’est un sujet qui appartient à Mondial Pare Brise. Par ailleurs, il y a sûrement des optimisations à réaliser sur les achats en diversifiant les fournisseurs. Le rachat vient de se faire avec la volonté de conserver l’autonomie du réseau. J’insiste là-dessus.

Décision Atelier : Ne pensez-vous pas que les autres assureurs pourraient se détourner de Mondial Pare-Brise avec désormais à sa tête un concurrent ?

Jean-Philippe Dogneton : Je n’ai jamais cru cela. Les assureurs sont pragmatiques, à la recherche d’une bonne qualité de service, d’une bonne expertise technologique et d’un coût raisonnable. Quand vous cochez toutes ces cases, il n’y a aucune raison qu’un assureur pense qu’aller chez Mondial Pare-Brise lui soit préjudiciable. Nous sommes un assureur leader qui fait que nous devons assumer un certain nombre de responsabilités. Avec cette acquisition, nous prenons une responsabilité qui, je l’espère, profitera à d’autres assureurs et à l’ensemble des assurés. La Macif a été à l’origine de nombreuses innovations qui, aujourd’hui, profitent à l’ensemble du monde de l’assurance.

Décision Atelier : Vous pourriez aller jusqu’à investir dans un réseau de carrosseries ?

Jean-Philippe Dogneton : La question qui se pose sur tous les sujets liés à la réparation est de savoir si on doit passer par une prise d’actionnariat, seul ou à plusieurs, ou par des partenariats renforcés.

« Maintenant que les constructeurs font des marges plus importantes sur les ventes de voitures, peut-être vont-ils lâcher la prise sur les pièces détachées. »

Décision Atelier : Le vrai sujet pour les assureurs, c’est le coût des pièces détachées. Pourriez-vous avoir une centrale de référencement ?

Jean-Philippe Dogneton : Il le faudrait. Sur ce sujet des pièces, nous souhaitons leur libéralisation totale. Il serait raisonnable d’abaisser à 5 ans le délai du monopole pour préserver le pouvoir d’achat des consommateurs. Les pièces pèsent beaucoup trop dans nos charges alors que le gouvernement nous demande de faire des efforts sur les cotisations. Maintenant que les constructeurs font des marges plus importantes sur les ventes de voitures, peut-être vont-ils lâcher la prise sur les pièces détachées. Nous sommes aussi sur le sujet des pièces de réemploi, un marché qui se structure. Nous pourrions être un acteur plus ambitieux dans cette structuration. Nous avons aujourd’hui 13 % de taux de pénétration en pièces d’occasion, ce qui est pas mal, mais nous devons encore progresser.

Décision Atelier : Vous réalisez avec l’automobile et ses 6,25 millions de contrats d’assurance (14 % de part de marché) autour de 2 milliards d’euros de chiffres d’affaires…

Jean-Philippe Dogneton : 2022 n’a pas été une bonne année de rentabilité sur l’automobile. Le ratio combiné reste supérieur à 100. La charge vitrage représente 10 % de nos dépenses IARD auto. Comme tous les assureurs, nous avons dépassé notre seuil d’alerte sur le bris de glace. La complexité technologique n’explique pas tout.

Décision Atelier : Vos agences n’ont-elles pas trop laissé faire vis-à-vis d’opérateurs peu scrupuleux ?

Jean-Philippe Dogneton : Pour simplifier les procédures et dans une logique économique, les assureurs ont totalement automatisé la gestion du bris de glace, sans déclaration préalable. On en paye maintenant les conséquences avec un retour en arrière. Il y a désormais matière à s’interroger sur nos processus.

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