La chaîne de démontage Indra du site de Romorantin.
La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec), qui entrera en vigueur l’an prochain, conduit indubitablement vers une industrialisation des acteurs du recyclage automobile. Seule la moitié des sites pourrait être en mesure d’investir, ouvrant la porte aux ventes de sociétés et aux concentrations de la filière vers des organisations européennes.
Leader sur son marché, Indra Automobile Recycling, réseau de recycleurs de véhicules en fin de vie (VHU), a réuni la profession, le lundi 27 mars, sur son site pilote de Romorantin dans le cadre de la dixième édition de son Forum. 300 professionnels de la déconstruction automobile étaient au rendez-vous. Des adhérents, ou non, intéressés de connaître les nouveautés de la filière. Au programme : rencontres avec une vingtaine de fournisseurs référencés du réseau mais aussi quatre conférences dont celle concernant la loi AGEC. Un texte qui va modifier le modèle économique des recycleurs.
Un changement de modèle que tous ne réussiront pas. Selon Loic Bey-Rozet, directeur général d’Indra, la loi pourrait faire disparaître 800 recycleurs du paysage, soit la moitié des effectifs. En effet, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire entend professionnaliser le recyclage afin d’augmenter la réintégration de matière recyclée dans la production automobile mais aussi accroître la production de pièces de réemploi. En 2030, elle devra être doublée pour atteindre le milliard d'euros de chiffre d’affaires, contre seulement 300 millions en 2017. La part de la revente à l'export de véhicules sinistrés devra être réduite.
Un tri plus approfondi en amont du broyeur sera envisagé pour répondre à ces exigences. À la pointe dans ce domaine, le site pilote d’Indra, avec son approche très industrialisée du démontage est, par exemple, en mesure d’extraire, en seulement 3 heures, 40 % de la masse d’un véhicule, soit environ 480 kg par voiture. Le centre traite ainsi 20 VHU par jour. Une belle performance ! Un véhicule acheté une centaine d’euros est ainsi en mesure de générer jusqu’à 450 euros de vente de pièces et de matière, dont du polypropylène, du reste plus cher recyclé que d’origine. Mais la rentabilité reste fragile. « Nous sommes à la corde », souligne Olivier Gaudeau, directeur de l'ingénierie.
Concentration des volumes et des acteurs
Fini l’empirisme et l’artisanal. « Nous démontions aujourd’hui, en moyenne, 14 pièces par véhicules. L’objectif est d’attendre demain les 25 », explique Loic Bey-Rozet. La pièce de réemploi est donc au centre du modèle économique des centres VHU, avec, il faut s’y attendre, probablement des hausses de prix de ces pièces.
La division par deux du nombre d’opérateurs conduira à une concentration des volumes de VHU à traiter par centre. D’importants investissements sont à prévoir au niveau des méthodes et des outillages avec une approche plus industrielle et rationnelle de la production afin de rester rentable. Cette forte demande d’investissements pousse à la concentration des acteurs au sein de réseaux, avec parfois une dimension européenne qui se dessine. Selon Loic Bey-Rozet, trois grands acteurs émergent en Europe : LKQ avec Rhenoy et Altracco, Genuine Parts Company avec sa marque Back2Car mais aussi Autocirc, qui appartient au fonds Altaroc. Le groupe suédois, très expérimenté, vient d'ailleurs de s’offrir deux Careco en France. L’Europe, c’est désormais le pari que fait aussi Indra. La filiale de Renault et de Suez, qui fédère 360 sites en France, espère s’étendre sur le Vieux Continent au Portugal, en Italie, en Espagne et en Belgique. Le recycleur vise aussi le Royaume-Uni.