: Un véhicule convertit divise par deux les émissions de CO2 par rapport à l’achat d’un véhicule électrique neuf, selon l’Ademe.
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DOSSIER 2/2 - Trois ans après la publication du décret autorisant et encadrant le rétrofit des véhicules thermiques, le marché se construit peu à peu du côté des prestataires et des constructeurs automobiles. Les premières homologations ont été validées et les premiers véhicules sont à la route. Reste maintenant à passer à la phase de massification pour une industrialisation réussie.
Reste que pour le moment, la réglementation en vigueur est contraignante. En effet, la pratique est encadrée par l’arrêté du 13 mars 2020 relatif aux conditions de transformation des véhicules à motorisation thermique en motorisation électrique à batterie ou à pile à combustible, et chaque homologation n’est valable que pour un seul véhicule. Or, si le secteur s’est très largement professionnalisé et est entré dans une phase d’accélération indéniable, les processus sont longs et coûteux, ce qui freine largement l’industrialisation des kits.
Une réglementation à simplifier…
« L'homologation est un enjeu de taille car elle assure la sécurité de l'utilisateur finale. Par ce biais, on s'élève finalement au rang de constructeurs avec les mêmes exigences », explique Clément Fleau, co-fondateur et président de Noil, porte-parole du métier Rétrofit au sein de Mobilians. Mais « pour accélérer le rythme, il est crucial de mettre en place un cadre réglementaire adapté, afin d'encourager le développement tout en assurant la sécurité et la fiabilité des conversions », complète Frédéric Strady, directeur général de Qinomic. « On essaye donc, avec le Gouvernement, de massifier ce marché et de lever les verrous qui existent », continue Dorothée Dayraut-Jullian, directrice des affaires publiques et de la communication de Mobilians.
La branche dédiée au métier du rétrofit de l'organisme appelle ainsi de ses vœux l’instauration d’une réglementation permettant une homologation européenne. Ce cadre réglementaire est nécessaire pour harmoniser les réglementations nationales existantes et favoriser l’essor d’un véritable marché à l’échelle du Continent. Aussi, une révision de l’arrêté de mars 2020 est actuellement en cours, afin de simplifier les possibilités de rétrofit et d’introduire des flexibilités techniques et administratives. Le projet d’arrêté modificatif vient d’être mis en consultation par le gouvernement. Il permettrait d’ouvrir la liste des laboratoires pouvant délivrer des homologations afin notamment de réduire les délais, d’intégrer de nouvelles gammes à l’image des VASP (pour véhicules automoteurs spécialisés) et surtout de regrouper dans une seule homologation un certain nombre de « types-variantes » de véhicules. « Par exemple, lors d’une prochaine homologation, nous pourrions inclure 45 modèles de véhicules qui ont des marques différentes », précise Clément Fleau.
Enfin, cette révision amène une réflexion sur l’accès aux données issues des réceptions communautaires, condition sine qua non pour constituer des regroupements de « types-variantes-versions » et d’intégrer dans une même homologation des véhicules similaires. Pour finir, les flottes publiques pourraient bien profiter d’une autre évolution. « Dans le cadre du projet de loi Industrie Verte, il se pourrait que les véhicules rétrofités puissent faire partie des appels d’offres lancés par les collectivités. Cela leur permettrait de prendre en compte ces véhicules dans leurs quotas de verdissement tels qu’ils sont définis par la Loi d'orientation des mobilités (LOM) », indique encore Dorothée Dayraut-Jullian.
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… et un cadre fiscal à renforcer
Le métier Rétrofit de Mobilians entend aussi largement contribuer aux discussions à venir dans le cadre du projet de loi de Finances 2024. Le texte est attenu à l’automne 2023 auprès du Parlement. Les annonces faites par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition Énergétique - visant une aide pouvant aller jusqu’à 6 000 euros pour un véhicule particulier et 10 000 euros pour un véhicule utilitaire léger - sont accueillies très positivement par la profession. « Ces annonces devront être traduites par des engagements fermes et les acteurs du rétrofit sauront aussi être force de proposition pour permettre au plus grand nombre d’envisager réellement le rétrofit comme une solution écologiquement et économiquement viable pour leur mobilité », insiste-t-on chez Mobilians. « On demande des primes de soutien qui soient à minima calquées sur le bonus écologique. Aujourd’hui, les montants sont assez faibles, de l’ordre de 2 500 euros, alors qu’il faudrait une prime à hauteur de 5 000 euros. Il est aussi nécessaire de réintégrer les véhicules lourds qui ont été sortis du dispositif lors de la dernière loi de finances », termine Dorothée Dayraut-Jullian.
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En conclusion, le rétrofit présente un potentiel plus que prometteur pour devenir un moteur de la mobilité durable. En transformant les véhicules existants en voitures électriques, cette pratique offre une solution plus que pragmatique pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer la qualité de l'air. En soi, le rétrofit s’établit comme une offre complémentaire pour un segment de clients. Cependant, son succès dépend encore de la mise en place d'un environnement favorable, incluant des technologies avancées, des réglementations adaptées et une volonté constante d'innover dans le domaine des transports durables.