Thierry du Crest, coordonnateur interministériel pour le développement du vélo et de la marche.
© ministère des Transports
Polytechnicien de formation, Thierry du Crest occupe le poste de coordinateur interministériel pour le développement du vélo et de la marche depuis septembre 2019. Ce « Monsieur vélo et marche » du gouvernement voit le déploiement de ces mobilités douces prendre le bon chemin. En alternant le rythme du sprint en danseuse pendant la période du déconfinement avec celui de la balade à bicyclette le reste du temps...
L’Automobile & L’Entreprise : En quoi consiste votre mission ?
Thierry du Crest : Je suis rattaché au ministère des Transports. Ma mission est de coordonner, comme son nom l’indique, l’intervention des différents ministères – par exemple le ministère de l’Intérieur avec la sécurité routière ou celui de l’Économie sur l’industrie du vélo – autour de la question du vélo et de la marche, mais sans me substituer à eux. En lien avec les ministères, je m’informe de leurs activités relatives au vélo et à la marche et je m’assure que les politiques publiques sont en synergies. L’autre partie de mon travail c’est de mettre en œuvre le plan vélo et mobilités actives et les mesures qui ont été décidées en veillant à ce qu’elles soient bien réalisées. La mission existe depuis 2006 et je suis la quatrième personne a occuper ce poste. Elle s’est étendue à la marche depuis le mois d’octobre 2022.
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L’Automobile & L’Entreprise : Avec la crise et le Covid, les actifs ont reconsidéré leurs déplacements : le vélo et la marche figurent-ils l’avenir de la mobilité ?
Thierry du Crest : Cela fait partie d’un bouquet de solutions, les autres modes de déplacements ne vont bien sûr pas disparaître dans un avenir proche mais leurs poids respectifs va évoluer dans le temps. La volonté est toutefois clairement de développer le vélo comme une alternative au monovoiturage pour les déplacements de moins de 10 kilomètres. Pareil pour la marche sur des déplacements encore plus courts. C’est un enjeu de transition écologique et de décarbonation des mobilités bien sûr, mais aussi une question de pouvoir d’achat puisque ce sont des modes de déplacement peu onéreux. Cela touche aussi à la santé publique, les mobilités actives permettant de pratiquer les 30 minutes d’activités quotidiennes recommandées par l’OMS. Bref, plus il y a de solutions de mobilité, plus il est facile et faisable de se passer de la voiture utilisée seule et de limiter les nuisances associées.
L’Automobile & L’Entreprise : L’enveloppe allouée au plan vélo (250 millions d’euros en 2023) sera-t-elle suffisante, notamment pour faire pédaler la France en dehors des centres-villes ?
Thierry du Crest : On estime qu’entre 3 et 4 % des déplacements se font à vélo en France alors qu’en Belgique et en Allemagne, on est plus aux alentours de 11 ou 12 %. Sans parler des Pays-Bas, qui sont autour de 29 %. C’est certes peu, comparé à nos voisins mais il n’y a pas de fatalité car il est possible de développer le vélo sur tous les territoires, les déplacements en voiture de moins de 10 km y étant toujours très nombreux (entre 30 et 50 %) y compris dans les secteurs ruraux. Il faut pour cela que les collectivités mettent en place des politiques cyclables avec des aménagements, mais aussi s’assure de la mise en place d’un écosystème de services dédiés (magasins, réparateurs...), du stationnement, des incitations (à l’achat, à la location) et de l’information.
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Sur le dernier mandat, il y a eu 100 millions d’euros par an alloués donc, 250 millions, c’est déjà deux fois et demie plus que ce qui a été versé précédemment. En 2017 il y avait environ 40 000 km d’aménagements cyclables sécurisés en France, en 2022 nous en sommes à 57 000. On estime qu’il en faudrait 150 000 km pour avoir un maillage suffisant sur tout le territoire. C’est donc un travail au long cours.
L’Automobile & L’Entreprise : Quelles solutions faut-il mettre en place pour dédommager les salariés piétons ? Sont-ils les grands oubliés du forfait mobilités durables ?
Thierry du Crest : Les choses sont encore très récentes en ce qui concerne la marche à l’échelle nationale, nous sommes donc encore dans une phase où il nous faut construire des politiques publiques, sachant que là encore c’est en premier lieu aux collectivités de décider d’élargir ou créer des trottoirs, d’installer des bancs et plus généralement de soutenir cette pratique. Néanmoins, il y a cette volonté de mettre en avant la marche dans le forfait mobilités durables comme un mode de déplacement à part entière et d’aider les collectivités à développer des plans piétons ou des plans marche.