Les échanges sont tendus entre Stellantis et le gouvernement.
© Stellantis
Les échanges entre le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, et Carlos Tavares, CEO de Stellantis, montent encore d’un cran aujourd’hui. Au cœur du débat se trouve la production d’une petite voiture électrique en France, en l’occurrence la e-208. Alors que le gouvernement fait le forcing depuis plusieurs mois, Stellantis ne veut pas céder. Les relations sont de plus en plus tendues.
Dans un entretien accordé au Figaro, le 5 juillet 2023, le patron de Stellantis rappelle tout simplement qu’il n’est pas possible de produire une petite citadine électrique compétitive en France face aux deux géants mondiaux que sont Tesla et BYD. Bruno Le Maire lui répond du tac au tac qu’il est capable de le faire, rappelant que Luca de Meo, CEO du groupe Renault le fait bien avec la R5 électrique…
Carlos Tavares dit « non » au gouvernement
Certainement lassé par cette pression du gouvernement, Carlos Tavares a rappelé que son groupe produira « 12 modèles électriques à forte valeur ajoutée en France. Cinq des 7 modèles de la marque Peugeot sont fabriqués en France. L'équation économique liée à la relocalisation forcée de ce projet ne serait ni dans l'intérêt de l'entreprise, ni dans celui du pays ». Et d’ajouter agacé : « D'ailleurs, demande-t-on à Elon Musk ou à BYD de fabriquer des voitures du segment B en France quand on cherche à les y attirer ? Quel paradoxe que d'applaudir les nouveaux entrants qui n'ont pas d'héritage tout en demandant à ceux qui ont contribué à la richesse collective depuis plus d'un siècle de se livrer à des exercices très périlleux – y compris sur le plan social ! »
Stellantis affaibli, le gouvernement appuie
Alors que Stellantis fait face à des difficultés commerciales et des défis au sein de son réseau, le directeur général du groupe n'hésite pas à élever la voix. Il souligne à juste titre que les constructeurs chinois arrivent en Europe avec des coûts de production inférieurs de 20 à 25 %, leur permettant potentiellement de mettre tous les concurrents en difficulté. Cette situation s'est déjà concrétisée avec les deux baisses successives des prix des véhicules électriques, initiées par Tesla depuis le début de l'année, qui ont fragilisé plusieurs grands groupes, dont Stellantis et Volkswagen Group. Face à cette nouvelle bataille de l'électrique qui s'engage, Volkswagen Group a même récemment annoncé un changement de cap. Les difficultés actuelles, tant internes qu'externes, auxquelles Stellantis est confronté ne sont probablement pas étrangères à l'insistance du gouvernement en matière de production de voitures électriques.
La petite voiture électrique abordable : un enjeu stratégique
Il convient de rappeler que la pression exercée par le gouvernement sur Stellantis ne date pas d’hier, mais dure depuis plusieurs mois. Le gouvernement ayant besoin d’une voiture électrique abordable produite en France pour espérer lancer son leasing social. Pourtant, Stellantis a annoncé officiellement sa décision de produire sa petite citadine 100 % électrique, l'e-208, en Espagne, le gouvernement ne se résigne pas et intensifie ses efforts pour rapatrier ce modèle sur le sol français.
Malgré les pressions exercées depuis plusieurs mois par le gouvernement français sur Carlos Tavares, P-DG de Stellantis, pour que la production de la Peugeot e-208 soit basée en France, les plans du groupe s'orientent vers l'usine espagnole de Figueruelas, près de Saragosse. En effet, cette usine est déjà chargée de la production de l'Opel Corsa-e et accueillera également la nouvelle Lancia Ypsilon en 2024.
Bruno le Maire met au défi Carlos Tavares de produire en France !
Après cette interview accordée au Figaro, la réponse du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Lors d’une interview pour BFM ce matin, le ministre de l’Économie et des Finances a demandé à Carlos Tavares de « relever le défi de construire des petits véhicules électriques en France ». Rappelant à cette occasion que Carlos Tavares « était bien content tout de même de bénéficier des aides françaises et du bonus écologique ».
« Faites comme Luca de Meo avec la R5 »
Et d’ajouter : « Moi, j’ai un seul point de désaccord avec Carlos Tavares : quand on voit les changements et l’accélération du changement climatique, je pense qu’il faut accélérer la bascule vers le véhicule électrique. Je sais que Carlos Tavares est un homme de défis, qu’il a relevé brillamment dans sa carrière industrielle. Et je souhaite qu’il relève le défi de construire des petits véhicules électriques comme la e-208 en France, comme le fait Luca de Meo (Renault Group) avec la R5 ».