D'ici 2025, près de 9 millions de voitures seront interdites de circuler dans les Zones à faibles émissions.
© DR
Depuis quelques semaines, plusieurs solutions pratiques émergent en France pour trouver une solution pour franchir la première phase d'interdiction des voitures Crit'Air 3 à l'intérieur des 42 agglomérations concernées par les Zones à faibles émissions en 2025. On y retrouve : l'achat d'un véhicule électrique abordable, la voiture d'occasion reconditionnée ou encore le rétrofit. Certains proposent même de remplacer la vignette Crit'Air par le contrôle technique.
L’entrée en vigueur de l’interdiction des voitures Crit’air 3 en 2025 est un véritable casse-tête pour neuf millions de français détenteurs de voitures qui seront interdites d’entrer dans l’une des 43 zones à faible émissions (ZFE) en France. Pour franchir cette première étape de la décarbonation des transports individuels, les solutions ne manquent pas même si elles sont toutes onéreuses et imparfaites.
A lui seul, le terme ZFE pour Zone à faibles émissions est stigmatisant ! Il irrite déjà de nombreux automobilistes concernés par l’application de la loi Climat & Résilience. Rappelons que les agglomérations de plus de 150 000 habitants sont concernées par ce programme d’interdiction des véhicules les plus polluants dans les centre-villes.
Le contrôle technique pour remplacer la vignette Crit’air
Les réseaux de contrôle technique ainsi le député Gérard Leseul appuient depuis quelques semaines une proposition pour faire entrer en jeu le contrôle technique dans ce casse-tête des ZFE. Même si la proposition a peu de chance d’être entendue, le parlementaire a rappelé que le système de vignette Crit’air pourrait être remplacé par une lecture automatisée de la vignette du contrôle technique quand la voiture entre dans le Zone à faibles émissions. Le problème de cette solution "contrôle technique" : c’est qu’elle ne répond pas du tout à l’objectif de décarbonation des transports individuels recherchés par la loi. Celle-ci engendrerait un nouveau coût pour le budget des ménages et des professionnels.
Le nœud du problème des zones à faibles émissions (ZFE), c'est l'application de l'exclusion des véhicules Crit'Air 3, lesquels représentent près de 6 millions de voitures dans les 42 agglomérations théoriquement concernées en France. « C’est tout simplement une bombe sociale », rappelait récemment Franck Cazenave en ajoutant que « ces voitures ne sont pas des véhicules très anciens ». Pour faire face à ce changement prévu en 2025, l'idée serait de repousser ce seuil à 2027. Même si des agglomérations comme Lyon ont d'ores et déjà annoncé leur volonté de reporter la prochaine échéance concernant la vignette Crit'Air 2, initialement prévue en 2026 à 2028, il faudra tout d'abord réussir cette première restriction de circulation dans les ZFE avec les voitures Crit'Air 3. Ce qui n'est pas une mince affaire.
Aucune offre pour les petits véhicules électriques abordables
Pour réussir la transition vers le zéro carbone en 2035 et favoriser ainsi l’achat de véhicule à batterie électrique, c’est bien l’offre qu’il va falloir changer en profondeur. À la différence de la Chine où le véhicule électrique à moins de 20 000 euros existe déjà, les constructeurs automobiles vont devoir trouver des solutions pour commercialiser des petites citadines compactes électriques et bon marché. Pour faire face à des investissements colossaux dans l'électrique, les constructeurs automobiles se sont concentrés sur une offre de véhicules dans les segments les plus élevés et les plus rentables. Une offre complètement inadaptée à une forte demande de masse comme l'exige la réglementation sur les zones à faibles émissions (ZFE). Commercialisés en moyenne entre 30 000 et 50 000 euros, ces véhicules full électriques demeurent de 30 à 40 % plus chers que le thermique. Ils sont inaccessibles.
Seul le petit véhicule chinois et pas cher pourra répondre à la demande
Pour parvenir à passer cette échéance de 2025 pour les voitures en Crit'Air 3, le véhicule électrique doit être abordable et de préférence à moins de 20 000 euros. À ce jour, une seule offre existe en France : c'est la Dacia Spring, voiture produite en Chine. Volkswagen tente de rattraper son retard en proposant, dès 2025, l'ID.2 avec un prix de départ inférieur à 25 000 euros. Le constructeur allemand travaille d'ores et déjà sur une petite citadine compacte à moins de 20 000 euros. En réalité, cette première marche vers le zéro carbone en 2025 devrait ouvrir la porte aux voitures électriques produites en Chine. Les seules capables de répondre à cette transition vers l'électrique à des prix abordables.
« Si on considère que 600 000 véhicules sortent de l’impact Crit’Air chaque année, en nous projetant en 2025, date à laquelle il y aura théoriquement 42 métropoles déployant une ZFE, nous constatons que 9 millions de véhicules seront directement concernés par les restrictions de circulation. Sur un parc roulant de plus que 40 millions de véhicules, ce n’est pas marginal. Si on resserre l’analyse sur les Français qui seront concernés par les ZFE et qui ne pourront pas se passer de leur véhicule, on atterrit à 6 millions de véhicules », déclarait récemment Franck Cazenave, qui a participé à cette étude avec les équipes du CSA et les entreprises souscriptrices (banques, groupes d’assurances, énergéticiens, etc.). 5,7 millions de véhicules Crit’Air 3 seront encore à la route en 2025, dont 4,1 millions devant évoluer en ZFE, c’est-à-dire que leurs possesseurs ne peuvent pas se passer de voiture.
Le rétrofit pourrait partiellement répondre aux ZFE
De son côté, Mobilians (ex CNPA) qui représente les services automobiles de la filière aval propose des solutions pour favoriser la mobilité dans les ZFE. Le syndicat patronal est résolu à trouver des solutions pour faciliter la mobilité dans les ZFE. Les dérogations obtenues au niveau du dépannage sont une première étape, mais il reste encore beaucoup à faire. Le syndicat s'engage à être une force de proposition pour promouvoir une mobilité équilibrée dans les ZFE. Le rétrofit, soutenu par le gouvernement, pourrait partiellement répondre au problème que posent les zones à faibles émissions. Il concernerait en grande partie les utilitaires plutôt que les voitures particulières. Le rétrofit ne pourrait en tous cas représenter non plus une solution globale.
Rappelons que le rétrofit électrique, c'est-à-dire à la transformation de véhicules thermiques déjà produits et mis à la route, en véhicules électrifiés revient sur le devant de la scène. Depuis la dernière édition du Mondial de l'Automobile, les choses s'accélèrent pour la filière française.
Cette nouvelle activité est devenue la 20e branche métier de l'organisation professionnelle Mobilians tandis que l'État – via les ministères de l'Économie, de la Transition énergétique, de l'Industrie et des Transports – lançait une grande concertation afin de recueillir les propositions des principaux acteurs du secteur.
Le coût de la ZFE et son impact social évident
Récemment, lors d'une conférence organisée par Mobilians à Paris, Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, a pris une position ferme contre les zones à faibles émissions (ZFE), déclarant : « Je ne mettrai pas un euro pour financer une ZFE dans ma région. Il faut arrêter tout cela pour éviter une révolte sociale ». Pour lui, la mise en place de ZFE dans les Hauts-de-France est impossible et conduira à une révolte sociale.
Xavier Bertrand a également défendu l'industrie automobile française en rappelant que « les Français ne savent pas ce qu'est une ZFE. Commençons par conditionner le bonus à la production des véhicules en Europe ! Nous étions les champions du monde dans les moteurs thermiques, mais nous avons remis notre titre en jeu pour le donner aux Chinois dans une catégorie où ils ont dix ans d'avance ». Pour lui, la voiture fait partie du patrimoine français et les Hauts-de-France sont une région pro-automobile où « le métro c'est la voiture ». Selon Xavier Bertrand, les Français n'ont pas encore conscience de l'impact des ZFE sur leur voiture. Il pense que le calendrier de mise en place des ZFE conduira à une révolte sociale. Il estime également que le leasing social ne changera rien du tout à la situation.
Les véhicules d'occasion reconditionnés gagnent en notoriété
Sur fond de déploiement des ZFE, 42 agglomérations théoriquement concernées à court terme, un Français sur cinq issu des ménages modestes roule encore dans un véhicule de plus de dix ans. Selon l’étude, 51 % des Français ne connaissent pas le niveau Crit’Air de leur véhicule. « À noter : cette réglementation pénalise en premier lieu les plus jeunes puisqu’un tiers des 18-24 ans (versus 13 % en moyenne) déclarent rouler dans un véhicule de Crit’Air 4 ou 5 déjà interdit dans certaines agglomérations », soulignent avec gravité les auteurs de l’étude.
Dans l’hypothèse du choix d’un nouveau véhicule, il serait fortement contraint par le budget disponible. D’ailleurs, 70 % des Français se tourneraient demain vers une voiture d’occasion et 59 % choisiraient encore un moteur thermique, dont 26 % un diesel. Soulignons avec prudence que ces dernières valeurs ont peu évolué en l’espace de six mois. L’étude se focalise aussi sur le cœur de métier d’Aramisauto pour mesurer que les Français ont une meilleure connaissance des différentes offres de VO que naguère. 63 % d’entre eux ont entendu parler des véhicules d'occasion reconditionnés. Et pour 62 % des répondants, les VO reconditionnés offrent des garanties plus fiables que les véhicules d’occasion en l’état. Un élément important dans une perspective budgétaire par rapport à d’éventuelles réparations à faire. Concrètement, « s’ils devaient acheter une nouvelle voiture demain, près de six Français sur dix (59 %) se tourneraient vers un professionnel pour acheter un véhicule d’occasion en l’état (32 %) ou reconditionné (27 %) contre 11 % auprès d’un particulier ».